(Extrait du "livre noir de la banque" de Gérard Faure-Kapper aux éditions Luthenay)
Il y
a-t-il violation institutionnelle de
l’article 544 du code civil sur le
droit à la propriété ?
La propriété des biens
en général, et de l’argent en particulier, est protégée par l’article 544 du code
civil (loi de janvier 1804) qui précise : la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière
la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou
par les règlements.
Pour perdre ce droit à
la propriété il faut, soit la volonté du propriétaire du bien de le donner,
soit l’aboutissement d’une procédure de justice à son encontre.
Quand ce bien, de
l’argent en l’occurrence, est remis à une banque, le cadre juridique de cette
action est un contrat de dépôt.
Le dépôt. C’est une convention par laquelle le déposant
demande au dépositaire de lui garder une somme d’argent. Ce dépositaire, la
banque, est tenu de la restituer intégralement à la demande du déposant (sauf
convention contraire).
Le dépositaire est en
droit de facturer certains de ses services ainsi que les frais engagés pour la
conservation de cet argent.
Dès lors le dépositaire doit établir une facture et la
présenter au déposant qui donne son accord de paiement.
Si le déposant refuse,
pour des motifs légitimes ou non, la banque dispose d’un droit de rétention des
biens.
Le déposant a toujours
son droit de propriété sur la somme en litige. Celle-ci doit être séquestrée
dans l’attente d’une décision de justice ou d’un accord.
Le compte courant. Pour des raisons de commodités et d’usage, une
convention de compte courant est passée entre les parties.
Les sommes représentant
les créances de la banque deviennent des articles de compte et seul le solde
est exigible.
La convention de compte courant ne peut en aucun cas
prendre le pas sur le contrat de dépôt qui lui-même s’inscrit dans le cadre de
l’article 544 sur le droit à la propriété.
La convention ne dispense pas du respect de la procédure
normale : facturation et autorisation expresse du déposant d’un paiement
par prélèvement sur le compte.
En cas de contestation : rétention et séquestre dans
l’attente d’une décision de justice ou d’un accord.
La loi autorise la
banque de ne pas émettre de facture dans certains cas. Cela n’autorise toujours
pas la banque à prélever sur les comptes sans autorisations.
Quand on interroge un
employé de banque sur cette question, la réponse est toujours la même : « le
fait que vous ayez signé une convention de compte courant et que vous ayez
connaissance des tarifs vaut autorisation de paiement de votre part. »
Cette réponse est
souvent aggravée par d’autres précisions : « si la banque devait
appliquer la loi, aucun découvert ne pourrait plus être autorisé, toutes les
écritures en dépassement seraient rejetées systématiquement. »
Le CIC précise même,
par écrit, qu’il n’a jamais été prévu de faire signer une autorisation de
prélèvement.
« Nous ne pouvons
pas, à la fois, rendre service au client et rester dans le cadre des lois. »
Réponse classique
sous-entendue : « oui, nous sommes hors-la-loi et nous n’avons aucun
droit de nous servir sur votre compte, mais comme vous n’aurez ni le courage,
ni les moyens de nous attaquer en justice, nous allons continuer et vous vous
laisserez faire ».
Reprenons le mécanisme
d’une transaction commerciale normale. L’exemple d’un restaurateur :
Celui-ci a élaboré une
« offre » qu’il va détailler sur un menu et une carte en indiquant
clairement la description et les tarifs de chaque plat. Ce document est visible
à l’extérieur de son établissement et le client peut le consulter à
l’intérieur. Il est donc bien informé.
Il consomme. Une
créance est née. Il doit payer une facture dont le détail est conforme au menu.
L’acte de payer est une
action volontaire du client. Il sort son porte-monnaie, sa carte ou son
chéquier et règle l’addition.
S’il ne veut pas payer,
le restaurateur a toute une panoplie de possibilités pour recouvrir sa créance.
Il peut faire appel aux agents, faire constater la créance impayée, mettre en
demeure par courrier, faire appel à un huissier qui saisira le juge, pour en
arriver à une contrainte allant jusqu’à la saisie. C’est une procédure
judiciaire au cours de laquelle le client peut s’expliquer et peut-être
contester l’addition. Au juge de trancher.
La possibilité donnée
au client de pouvoir s’expliquer est un droit inaliénable. On ne peut imaginer
le restaurateur aller dans le vestiaire, extraire le portefeuille du manteau du
client et se servir. À ce moment, c’est le client qui serait en droit de porter
plainte pour vol.
Revenons à la banque.
Le cheminement est le même. La banque est une entreprise comme une autre, elle
a le droit de proposer et facturer ses services. Dans le cadre d’une convention
de compte courant, le client est informé du détail et des tarifs. Tout se fait
dans une parfaite transparence.
Le client va
« consommer » tel service et une créance va naître.
La différence entre les
banques et toutes les autres entreprises, c’est qu’elles s’arrogent le droit
d’aller sur le compte du client et prélever la somme qu’elles veulent. Le
client n’a plus rien à dire. Il a perdu son droit de discuter et de contester.
Pourtant il s’agit de son argent, sa propriété privée protégée par l’article
544 du code civil au même titre que tous ses autres biens.
L’exemple est simpliste
mais illustre parfaitement ce véritable privilège provenant de la facilité
matérielle pour la banque de puiser dans les comptes.
Les banques gardent,
inscrites sur un compte courant, les sommes confiées par leurs clients. Elles
peuvent en faire d’autres usages, notamment le prêter ou le placer. Mais si le
client a mis 100 euros, il doit pouvoir récupérer 100 euros. La banque ne peut s’autoriser
de prélever sur le compte du client qu’avec son autorisation expresse :
signature au bas d’un chèque ou d’un virement, autorisation de prélèvement,
numéro de carte, etc.
Que va-t-il se passer
si les citoyens négligent la défense de leurs droits ?
Aujourd’hui, avec un
numéro de carte bleue, n’importe quelle entreprise peut prélever de l’argent
sur le compte du titulaire. Qu’est-ce qui empêche le restaurateur de débiter le
compte du client de divers frais de gestion ? Rien sinon un recours en
justice. Mais comme les clients n’interviennent déjà pas contre leur banque,
ils n’interviendront pas non plus contre les autres entreprises.
Impossible ? Si
les banques peuvent le faire, toutes les entreprises le feront.
Cela retire au client
tout droit de contrôle, de discussion, de contestation et de négociation.
Si l’on respecte le
droit à la propriété, on interdit ces prélèvements pour l’ensemble des
entreprises, y compris les banques.
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