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vendredi 10 novembre 2017

Crédit Mutuel VS l'APLOMB: une audience surréaliste à la 17ème correctionnelle



Par Gérard Faure-Kapper,

La plainte datait de la veille de Noël de l'an de grâce 2014. Trois années plus tard, c'était l'audience au Palais de Justice de notre bonne ville de Paris.

J'avais écrit que le Crédit Mutuel d'Abbeville avait des pratiques honteuses et répréhensibles, à savoir commettre le délit d'usure.

Il est évident que mes propos n'étaient pas lancés en l'air. Ils s'appuyaient sur une étude complexe qui comprenait 193 pages.


L'audience était prévue le 9 novembre 2017. C'était l'anniversaire du 18 brumaire. J'étais accompagné par l'âme de Bonaparte et par Maître Katia Debay. J'étais donc parfaitement serein.

La 17ème correctionnelle est spécialisée dans les questions de diffamation par voie de presse. Elle remplace le pré carré des duels d'autrefois. Il est vrai que j'aurais préféré cette méthode, plus noble et plus efficace. Un champ près d'Abbeville, dans un village nommé Crécy. Un duel à  l'arbalette avec arrêt au premier sang. Deux adversaires qui se regardent et se toisent, puis le signal et deux flèches d'acier se croisant à plus de 800 kilomètres/heure de vitesse conjuguée.

Mais les bonnes manières se perdent.

Le tribunal, composé de trois magistrats, passe à la lecture de l'acte d'accusation. Debout derrière la barre, j'écoute, impassible. Je ne nie rien de ce qui est dit.

Ensuite, ils m'apprirent que ma condamnation serait de publier ce jugement dans mon blog. Tout ça pour ça. Il est évident que toute personne mise en cause a un droit de réponse, pas besoin d'un procès pour cela.

Puis je réponds à leurs questions. L'affaire est très technique, mais il me semble que j'arrive à rendre vivant le langage des chiffres et des principes comptables. J'essaye d'être pédagogique et clair dans un domaine qui n'est pas un sport de masse.

Les chiffres, ça ne se discutent pas, pas plus que les rapports proportionnels. Les chiffres n'admettent pas la contradiction. deux plus deux font quatre. Les chiffres sont porteurs de vérité, ils sont réels. Les chiffres sont comme la mort décrite dans le Colonel Chabert, il sont d'abord rouge, puis bleus, puis froids et enfin silencieux.

Les juges ont écouté avec attention mon exposé. Visiblement intéressés, ils prirent de nombreuses note.

Puis vint l'intervention de l'avocat de la banque, un as dit-on. Il est parti dans une vague contestation des rapports, sans y croire lui-même. Puis il partit sur d'autres terrains. Je savais qu'il ne pouvait pas s'attaquer à mon rapport et j'essayais de deviner sa stratégie. Il évoqua mon passé bancaire dont je n'ai pas à rougir, puis dériva brièvement sur une période noire marquée par la maladie et un drame familial. D'évidence, il cherchait une faille.

Et puis vint le coup bas.

- Monsieur Faure, vous étiez bien au Crédit Mutuel ?
- Oui,
- Votre dernier poste dans quelle Fédération ?
- Valence,
- Alors vous connaissiez Monsieur Nobili ?
- Evidemment, c'était mon Directeur Général,
- Et où travaille cette personne actuellement ?
- J'ai appris qu'il était dans la Fédération Nord Europe,
- Vous aviez déposé plainte contre Monsieur Nobili ?

C'est alors que j'ai compris. En rassemblant mes souvenirs, je me rappelle d'un incident survenu en octobre 1997 qui m'avait amené à déposer une plainte contre le Crédit Mutuel.

Il s'agissait plutôt d'un malendendu. Mon directeur avait arrangé l'affaire, et au bout d'une semaine, j'avais retiré ma plainte. Par la suite, j'avais regretté d'avoir agi ainsi. mais c'est la vie.

Seulement, l'avocat du Crédit Mutuel faisait une tentative d'invoquer l'animosité personnelle qui m'animait vis-à-vis de cet homme. Pour ça, il s'appuyait sur un évènement vieux de 20 ans.

L'avocat avait voulu me déstabiliser, il avait réussi.

Monsieur Nobili était un homme apprécié de tous. Il l'est toujours je présume. Un très grand banquier dont les compétences sont largement au dessus de la moyenne de ses pairs. Sa méthode de management était la proximité avec son équipe qui l'appréciait tout comme moi. Très humain et surtout d'une loyauté à toute épreuve. Lorsque j'ai eu mes problèmes de santé, il pouvait me virer facilement. Il ne l'a pas fait et m'a mis à l'abri dans un poste tranquille, afin que je me rétablisse.

J'ai toujours eu pour lui un immense respect.

Et je me trouve face à un avocat qui essaye de convaincre le tribunal de mon animosité personnelle, expliquant cet acharnement contre le Crédit Mutuel.

Oui, c'était un coup bas. Seulement, en voulant en faire trop, il a même choqué les juges témoins de cette basse manoeuvre. L'incident fut clos.

Ensuite, cet avocat a encore essayé de discuter de chiffres et de techniques bancaires, sujets inconnus pour lui.

La juge a alors donné la parole à Maître Debay. Un dossier épais de 30 centimètres, une plaidoirie minutieusement préparée, des références légales et jurisprudencielles illustrant chacun de ses propos.

Elle parlait calmement, d'une voix claire et convaincante, égrenant les faits, apportant les preuves. Elle n'hésita pas à s'approcher des juges en brandissant mes études, en prenant des exemples, en démontrant la véracité de mes calculs.

De l'avis de tous, présents dans la salle, ce fut une plaidoirie sublime, d'un sujet technique complexe qu'elle maîtrisait parfaitement elle en fit une belle histoire.

Et puis, ce fut la fin de son intervention. Alors elle alluma la post-combustion. Les arguments clefs ressortaient et se resserraient dans une logique implacable, pour faire ressortir les problèmes profonds du système mutualiste.

Ce pilonnage d'artillerie réduisait en champ de ruine la maigre et maladroite défense de l'adversaire.

Puis ce fut un silence tellement sonore que les murs de la 17ème, qui en avaient pourtant tellement vu et entendu, tremblaient encore quand nous quittames la salle.


Le délibéré est fixé au 22 décembre.

Ce procès est un tournant. Désormais la question du remboursement des frais d'intervention se posera inéluctablement dans les relations bancaires.

Merci à toi, Katia, et merci à Dominique, Elena et les autres qui étaient présents et m'ont soutenu.


Aujourd'hui je l'affirme, la victoire est à notre portée.









8 commentaires:

  1. Bravo à vous et les avocats des banques ne changeront jamais, ils utilisent toujours des coups bas, j'en ai fait l'expérience, ça prouve juste la mentalité des banquiers.

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  2. Bravo, un immense service rendu à la société. Merci.

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  3. Juste un immense bravo ,pour le pot de terre contre le pot d'argile !!

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  4. Bonjour a tous .J’étais présent au procès , un grand merci a toutes l’équipe de l'aplomb de leur maîtrise dans ce dossier qui défendent les valeurs et non pas une vieille histoire qui ne correspond pas du tous au procès . Mr Gerard Faure kapper vous etes resté solide ,droit ,quelque peut déstabiliser par cette avocat qui cherché a vous discrédité mais convaincue de vos propos vous etes resté seul devant (sans perdre votre sans froid) vos accusateurs ,et vous avez argumentés avec respect contre ces mêmes qui vous accuse .Une porte se referme sur cette vieille histoire ,impressionner ,l'avocat et juge ne peuvent que prendre acte de votre courage et vos convictions sur la forme et le fond du dossier avec Maître Katia Debay que vous décrivez ensemble .L'avocat adverse a plaidoyer avec beaucoup d’hésitation et peut convaincant pour ceux qui été présent. Bravo a vous . Cordialement Mr Lacroix Eric .

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  5. -Merci pour ce témoignage dans la procédure qui vous oppose à ces charognards de banquiers, qui n'hésitent pas à pousser des foyers jusqu'au suicide.
    -félicitation à l'APLOMB et ses collaborateurs (trices) pour votre combat engagé qui sans nul doute fera changés les us et coutumes de certains banquiers peut scrupuleux.
    -le 22/12/2017 fera sans doute date dans l'histoire,bravo pour votre acharnement !!

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