Par Gérard Faure-Kapper.
Ces études ne revendiquent qu’un but
pédagogique. Il s’agit, à partir d’un exemple concret, d’inciter à raisonner
selon une logique juridique. Les énoncés des problèmes ne s’appuient que sur
des faits précis et prouvés. Nous ne citerons pas les études concernées mais nous
donnerons certaines indications afin qu’elles se reconnaissent pour leur
permettre d’analyser et de comprendre leurs actions. Le cas échéant, d’en tirer
les conclusions et de prendre les mesures correctives nécessaires.
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ETUDE DE CAS N°2 : Le conflit
d’intérêt
Concerne l’étude d’un huissier situé à
Paris 1er.
(Suite
du cas n°1)
CONTEXTE.
Un
client avait contracté un prêt chez Ménafinance. En 2009, des difficultés
l’obligent à cesser les paiements pendant 3 mois.
ENONCE DES FAITS :
Début
2011, Ménafinance prononce la déchéance du terme du prêt cité dans le cas n°1
et mandate un second huissier parisien.
Il
écrit une lettre avec l’entête de son étude en ces termes :
Je
résume :
Cette somme est
due à la date en référence pour un paiement immédiat et non fractionné
Il
y a lieu désormais d’effectuer votre règlement A MON ETUDE par tout moyen à
votre convenance et notamment par chèque bancaire ou mandat A MON ORDRE en
indiquant les références de l’étude au dos.
J’attire
votre attention sur le fait que faute de règlement dans ce délai de huitaine,
j’engagerai à votre encontre une procédure judiciaire dont les frais seront mis
à votre charge.
Les
intérêts sur les sommes précitées courent jusqu’au COMPLET REGLEMENT. »
ANALYSE :
Nous
sommes dans une procédure extra judiciaire de «recouvrement amiable »
En
théorie, l’huissier agit en tant que cabinet de recouvrement et non en tant qu’officier
ministériel et public assermenté.
Pourtant,
sa lettre à entête d’huissier lui permet d’entretenir auprès de sa victime
l’illusion que la démarche est officielle.
L’objectif
étant d’effrayer le client.
D’abord,
« Je suis chargé par Ménafinance de
procéder au recouvrement des sommes indiquées ci-dessous : »
Il
doit joindre le « mandat » donné par Ménafinance et son cadre
juridique. Il ne le fait pas car la nature de sa démarche apparaîtra clairement
au client.
« (Détail et total de 5.911,26€
pour une créance de 4.738,47€)
Cette somme est due à la date en
référence pour un paiement immédiat et non fractionné »
La
charge de l’huissier implique un devoir de diligence, de prudence et de
vérification. De toute évidence il a manqué à son devoir sinon il serait tombé
sur le vice de forme du contrat.
Pourtant,
sans n’avoir rien vérifié, il affirme que cette somme est due. Dès lors, sa
responsabilité est engagée.
Pour
aller plus loin, en l’occurrence dans ce dossier, les intérêts étaient
constitutifs d’un délit d’usure.
Nous
pouvons déjà parler de : recel de
délit d’usure par un officier ministériel et public assermenté dans l’exercice
de ses fonctions.
« Il y a lieu désormais d’effectuer
votre règlement A MON ETUDE par tout moyen à votre convenance et notamment par
chèque bancaire ou mandat A MON ORDRE en indiquant les références de l’étude au
dos. »
Vous
devez les fonds à Ménafinance et non à cet huissier. Pour en être bénéficiaire,
il doit joindre le mandat donné par l’organisme de crédit, en précisant qu’il
est habilité à recevoir les fonds.
Pourtant,
il ne le fait pas, ce qui constitue une nouvelle faute.
« J’attire votre attention sur le
fait que faute de règlement dans ce délai de huitaine, j’engagerai à votre
encontre une procédure judiciaire dont les frais seront mis à votre charge. »
Afin
de vous presser pour le paiement, il va assortir sa lettre d’un chantage à la
plainte. De plus, il affirme que les frais seront mis à la charge du client,
alors qu’il est très rare qu’un juge les lui impute.
CONCLUSIONS ET DENOUEMENT
En
résumé, voici la liste des fautes commises sciemment par l’huissier.
1°) Il utilise son titre d’huissier dans
le cadre d’une mission de recouvrement amiable, dans un but évident de pression
sur la victime.
2°) Il n’a diligenté aucune des
vérifications imposées à sa charge sur la réalité de la créance et la bonne
forme juridique des contrats.
3°) Il n’a pas joint à son courrier le
mandat reçu par son donneur d’ordre.
4°) Il exige le paiement « à mon nom
et à son ordre » sans que l’on sache si l’organisme de crédit lui a donné
ce pouvoir d’encaissement.
5°) Il se rend coupable de menaces,
d’intimidation et de chantage en affirmant comme vérités les conclusions
hypothétiques du tribunal.
Soit
vous estimez que la somme est due, dans ce cas vous vous rapprochez de
l’organisme de crédit.
Soit
vous voulez l’arbitrage de la justice, alors vous écrivez à l’huissier pour
qu’il se fasse délivrer une ordonnance portant injonction de payer par le
tribunal d’instance compétent.
Le
recours contre l’huissier ne se fera utilement qu’après la décision de la
Justice.
En
l’occurrence, et dans ce cas d’étude, l’huissier a assigné sa victime devant le
tribunal. Il s’est avéré que le client ne s’est pas présenté.
Le
juge à vérifié la régularité du contrat et la réalité de la somme due.
Il
s’est avéré qu’il a annulé le contrat pour vice de forme. Il a également
prononcé la déchéance du terme des intérêts.
Ménafinance
a été condamné à verser 8.700€ à son client au lieu des 5.911€ réclamés par
l’huissier.
Cette
affaire met en lumière le CONFLIT D’INTERET existant entre l’huissier agissant
en tant que cabinet de recouvrement et ce même huissier dans sa fonction
d’officier ministériel assermenté.
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