mercredi 19 octobre 2016

Grosse augmentation des tarifs bancaires: les raisons de cette politique de diversion



Par Gérard Faure-Kapper

Les nouvelles grilles tarifaires sont arrivées. Les augmentations sont très importantes.

Toutes les associations de consommateurs sont mobilisées. Toutes, sauf une, l'APLOMB.

Les associations sont souvent dirigés par des juristes n'ayant aucune expérience de l'exploitation bancaire. Ils ne peuvent pas comprendre la manœuvre exécutée par les banques.

Pour comprendre, il faut se replonger dans l'histoire, c'est comme pour tout.

Nous sommes le 13 juin 1941. La France est occupée. Un texte sort sur la réorganisation du système bancaire.

Ce texte prévoie entre autre, l'obligation pour les banques d'organiser un "service de caisse", c'est à dire ouvrir des guichets et effectuer les opérations, encaissements, virements, etc.

Pour financer l'investissement de ce service et en assurer l'exploitation, le texte interdit aux banques de rémunérer les comptes de chèque, Ça lui fait donc des ressources gratuites qu'elle peut rentabiliser en accordant des crédits.

Dans les années 70 et 80, l'informatisation débarque en masse.

Avant, pour effectuer un virement, l'employé devait remplir une liasse de 6 feuilles auto carbonée. Puis, dispatcher des feuilles: 1 pour le client, une pour la compta, une pour la chambre de compensation, 2 pour la banque bénéficiaire et une dans le dossier,

Le service de caisse correspondait à un véritable travail.

Puis, avec l'informatique, ce travail n'existe plus. La saisie se fait directement puis par les autres moyens, minitel puis internet.

Nous sommes en 1992. La France est de nouveau occupée suite à Maastricht.

Par contre, le coût du service de caisse est négligeable.

En contrepartie, la loi devrait faire sauter cette interdiction de rémunérer les comptes courant.

Eh bien non. Les banques, déjà rémunérés pour un service qui ne leur coûte presque rien, lancent une tarification de masse. Cette année voit l'apparition des grilles tarifaires. 


Telle le sergent Thénardier, aubergiste à Montfermeil, tout est tarifé.

"Je facture les puces,
Les rats, les cafards.
Je compte de combien
Leur ombre use le miroir.
Avant leur départ,
J'ajoute la valeur
Des mouches que leur clebs a gobées dans l'secteur.
On a tous nos petites ruses
Quand vient l'heure de l'addition.
Avec tout c'qu'ils sifflent,
Pendant qu'y s'empiffrent,
Les chiffres montent et montent jusqu'au plafond."


Et la banque fait de même.

Ce n'est qu'en 2005 que les banques sont autorisées à rémunérer les comptes courants, mais cela reste symbolique.


Et puis dans les années 2000, les banques s'aperçoivent que les tarifications pour les frais d'intervention devient leur source principale de profits. 


Alors, elles se déchaînent.

Tous les comptes sont rackettés.

Mais mais mais, les banques ne se rendent pas compte que les frais d'intervention financent les accords de découvert, en alourdissent les coûts et en augmentent mécaniquement les TEG.

Les banques commettent alors quotidiennement un délit d'usure quotidien et généralisé.

45.000€ d'amende, 2 ans de prison, 5 ans d'interdiction d'exercice du métier.

L'appellation initiale de ces frais était "frais de décision de paiement" ou "frais de forçage".

Le 5 février 2008, un arrêt de cassation reconnaît l'infraction et condamne une banque.

Les banquiers se réunissent. Ils transforment l'appellation en "commission d'intervention".

Changer le nom ne sert à rien. Le 8 janvier 2013, nouvelle cassation qui invite les juge à vérifier la cause exacte de la facturation.

Et depuis, c'est le conflit. Les banques comptent sur leurs avocats pour démolir le plaignant. Les clients font appel à l'APLOMB pour reconstituer les comptes et démontrer les faits.

2016. L'APLOMB a gagné. Ses études ne sont plus contestées par les juges. Même si certains juges du commerce continuent à ne pas examiner les requêtes, commettant ainsi un déni de justice, nous gagnons en appel. En tout cas, nous n'avons pas enregistré d'échec.

Les banquiers, les vrais, ne sont pas idiots. Ils savent que l'APLOMB a raison. L'annonce d'une vague de procès les fait réfléchir.

Non seulement ils devront petit à petit supprimer ces frais d'intervention, mais surtout rembourser sur les 5 dernières années.

Alors, pour équilibrer leurs comptes, ils augmentent massivement les autres services.

Le résultat de cette diversion ne se fait pas attendre. Les autres associations montent au créneau. Certains dénoncent les frais de gestion (2€ par mois).

Tous oublient, par inexpérience, que ce n'est pas le tarif qui compte, mais la cadence.

Ma banque passe le prix des lettre de 10€ à 16€. Vais-je protester ? Ça dépend.

Recevoir une lettre à 16€ 3 fois par an est moins cher qu'en recevoir 5 par semaine à 10€.


En conclusion, l'APLOMB ne rentre pas dans le piège tendu par la diversion des banques.

Nous continuons à monter des dossiers pour le remboursement des frais d'intervention.


  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire