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mercredi 21 septembre 2022

Associations de consommateurs: réveillez-vous !



Chaque année, vers Vendémiaire, les ci-devant responsables d'associations d'usager de banque se déchainent contre les frais bancaires, et notamment les frais d'intervention.

Que choisir parmi tous ces articles. Les 60 millions de consommateurs que nous sommes s'y perdent.

Le scénario est toujours le même. Des articles en gros et gras fleurissent à la une de certains magazines dans les kiosques. "Halte aux frais abusifs", "frais bancaires, bientôt la fin", "Les frais sont ruineux" etc.

Ensuite, c'est le défilé sur les plateaux télé de responsables d'associations. Et tout ceci remonte au ministre de l'économie.

Il promet, la main sur le cœur (et non le cœur sur la main) qu'il va se fâcher et qu'une solution sera apportée. Les banques s'engagent à modérer l'évolution de l'augmentation des tarifs en les maintenant inférieurs à l'Allemagne, le Brésil et la Papouasie-Nouvelle-Guinée.

Il promet de limiter les frais des PFDN (les-plus-fragiles-d'entre-nous). La définition de cette engeance ? Il n'y en a pas, c'est laissé à l'appréciation des banques. En d'autres mots, vous en êtes exclus car vous avez les moyens de payer.

Les chiffres tombent. La moyenne des frais annuels n'est que de 273€. Elle est inférieure au Canada et au Zimbabwe. Alors réjouissons-nous.

Et il ne se trouve aucune association pour démentir. Personne pour expliquer que 273.€ est une moyenne. Pour la plupart des clients concernés, ce chiffre est... mensuel.

Les associations se précipitent dans le piège dressé par les banques. Elles militent pour un plafonnement de ces frais. Ce qu'elle ne voient pas, c'est le fait qu'en acceptant une limitation des frais, elles en reconnaissent la légalité. Vous serez fusillé avec 6 balles au lieu de 12. Ce n'est pas encore l'idéal, mais ça va dans le bon sens.

La légalité. Oui ces frais sont légaux. Ils sont prévus dans la grille tarifaire, complément de la convention d'ouverture de compte que le client a signé. 

J'admets qu'ils ont raison. Le Prozac aussi est légal, mais essayez d'en avaler trois tubes...

Nous avons démontré de manière indiscutable que ces frais alourdissent le coût des découverts et en augmentent mécaniquement le taux.

En conséquence, le TEG affiché est systématiquement faux.

Personne, ni les autorités de tutelle, ni les associations de protection des usagers de la banque ne nous suivent dans ce raisonnement.

Heureusement que les juges, chargés d'arbitrer ces litiges, nous prêtent leur attention, comprennent nos démonstration... et donnent quasiment chaque fois raison au client en condamnant les banques à rembourser.

Heureusement aussi que les clients comprennent cette supercherie qui leur coûte si cher, voire les ruine.

Parce que, eux aussi, ont un cerveau !







mardi 13 septembre 2022

Prêts en devise: la Cassation confirme le caractère abusif de la clause monnaie




Prêt libellé en devise étrangère. Par Katia Debay, Avocate.

Parution : mardi 26 juillet 2022

Adresse de l'article original :

https://www.village-justice.com/articles/pret-libelle-devise,43289.html

Reproduction interdite sans autorisation de l'auteur.

 

Le caractère abusif de la clause de monnaie doit être apprécié selon les critères de la jurisprudence de la CJUE (informations permettant d’évaluer le risque des conséquences économiques négatives sur les obligations financières) [1].

 

A) Sur l’imprescriptibilité.

Dans un arrêt concernant l’affaire Helvet Immo, en date du 10 juin 2021 (C-776/19), la CJUE avait confirmé que l’action en reconnaissance des clauses abusives ne pouvait être soumise à un délai de prescription.

Dans son premier arrêt en date du 30 mars 2022, la Cour de Cassation réaffirme l’imprescriptibilité de l’action tendant à voir déclarer le caractère abusif d’une cause.

La Cour de cassation applique le principe d’effectivité du droit de l’union.

La position des juridictions du fond qui fixent le point de départ du délai de prescription à la date de l’acceptation de l’offre de prêt, n’est pas de nature à assurer une protection effective du consommateur.

En effet, ce délai risque d’avoir expiré avant que le consommateur puisse avoir connaissance de la nature abusive d’une clause de son contrat.

 

 

B) Sur l’appréciation du caractère claire et compréhensible de la clause.

 

Le caractère clair et compréhensible nécessite que l’emprunteur comprenne la clause sur le plan formel et grammatical mais également sa portée concrète.

 

Il doit être démontré qu’un consommateur moyen, a été suffisamment informé afin d’évaluer et appréhender le fonctionnement de la clause et évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, de telles clauses sur ses obligations financières (notamment sur l’augmentation possible du capital emprunté).

 

Selon la haute juridiction, la nécessité d’une transparence ne sera remplie que si l’emprunteur a été averti du contexte économique qui pourrait avoir des répercussions sur le taux de change.

En l’espèce, il n’avait pas été indiqué à l’emprunteur qu’il s’exposait à un risque de change qui serait, éventuellement, économiquement difficile d’assumer en cas de dépréciation de la monnaie dans laquelle il percevait ses revenus par rapport à la devise étrangère dans laquelle le prêt a été accordé.

Concrètement, il s’agit pour la banque de communiquer des exemples de calcul concrets du risque de change.

 

Aucun document ou simulation n’avait été communiqué permettant d’évaluer concrètement les hypothèses économiques des coûts de vente/achat de la devise au remboursement du prêt en cours.

 

Malgré ce montage spécifique et complexe du prêt en devises, la banque n’avait pas éclairé les emprunteurs sur la conséquence, anormale, d’une augmentation du capital emprunté en dépit du versement des mensualités censées permettre l’amortissement de ce capital.

 

Il est considéré que la clause est déséquilibrée dès lors que le professionnel ne peut pas s’attendre raisonnablement, en respectant ses obligations en matière de transparence, à ce que l’emprunteur accepte un tel risque disproportionné et sans limite, du risque de change alors même que de son côté, la banque dispose d’outils financiers (produits de couverture, swaps de devise, contrats à terme et options de change) afin de couvrir le risque de change, lié aux prêts en devise.

 

Il s’agit d’un nouveau revirement de jurisprudence de la part de la Première Chambre civile de la Cour de Cassation.

 

Katia Debay, Avocate Barreau de Versailles

[1] C. Cass 30/03/2022 n° 19-17.996 et C.Cass 20/04/2022 n°20-16.316.